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Bonjour à tous. Je m’appelle Piaras Mac Éinrí et je suis professeur de Géographie et spécialiste des études sur la migration et l’intégration, à l’University College Cork en Irlande. Je travaille également avec les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile dans cette ville.

C’est un honneur et un privilège d’être invité à illustrer mes remarques, notamment sur la base des données irlandaises, sur le dernier Rapport de la Fondation Anna Lindh sur les tendances interculturelles dans la région euro-méditerranéenne. Il s’agit d’une enquête très précieuse et fascinante qui fournit des données de premier ordre qui nous permettent de comparer et de contrer les attitudes dans une série de pays européens et de pays du sud et de l’est de la Méditerranée.

Tout d’abord un mot sur l’Irlande. Nous sommes une anomalie au niveau européen, puisque nous n’avons obtenu notre indépendance qu’il y a environ un siècle.

Jusqu’à un passé récent, ce pays pouvait être décrit comme pauvre et périphérique, sous-développée et surtout rurale. Son principal produit d’exportation, pendant des générations, a été sa population. Les attitudes étaient conservatrices et conformistes et le statut des femmes n’était pas égal à celui des hommes.

Au fil des 30 dernières années, en revanche, un énorme changement s’est produit. Les investissements dans l’éducation ont transformé le pays et l’économie. L’adhésion à l’UE, les investissements étrangers et maintenant l’immigration ont transformé l’Irlande dans un pays très différent - 14% de la population de ma ville de Cork, par exemple, est née à l’extérieur du pays, alors que près de la moitié de tous les émigrants récents d’Irlande est rentrée. 

Tout cela a été accompagné d’une révolution sociale et culturelle, notamment concernant le statut des femmes et la création d’une société plus ouverte et plus tolérante.

Je voudrais mentionner brièvement quatre points de l’Enquête qui concernent ces changements et qui les illustrent de différentes manières.

Le premier point concerne les perceptions du rôle des femmes dans la société. Ce rôle était autrefois très traditionnel. Par exemple, les femmes employées dans le secteur public devaient démissionner en cas de mariage - elles ne pouvaient pas continuer à travailler. Cela n’arrive plus aujourd’hui et nous constatons, en revanche, un fort soutien en faveur d’un rôle accru des femmes dans la vie publique - au sein du gouvernement, dans les entreprises, dans les domaines de la science et de la technologie, de la culture, des sports, des médias et de l’éducation. 

Cela ne signifie pas que le travail des femmes au foyer n’est pas encore apprécié - il l’est, et les données de l’Enquête le montrent de façon très claire.

 Toutefois, cela soulève aussi une question, évidemment, pour les hommes : en échange de leur soutien à un rôle plus important des femmes dans la société en général, sont-ils - les hommes – également prêts à jouer un rôle plus actif à la maison ?

Deuxièmement, les valeurs fondamentales dans l’éducation des enfants. Nous avions autrefois un système assez conformiste qui mettait l’accent sur l’obéissance, la famille et la religion, par-dessus tout et nous avons constaté un certain changement d’attitude. Nous voyons par exemple que l’une des valeurs les plus importantes est le respect des autres cultures et nous constatons également que la pensée indépendante et la curiosité sont des valeurs importantes que les enfants doivent apprendre dans le système éducatif. 

La nature plus laïque de la société irlandaise moderne se reflète dans l’importance un peu limitée accordée à la religion, et bien sûr, nous sommes cohérents avec d’autres pays européens, mais peut-être différons-nous, dans une certaine mesure, des partenaires du sud et de l’est de la Méditerranée qui ont également participé à cette Enquête.

Un troisième point concernait la diversité religieuse et culturelle et la tolérance. Là encore, 86% des sondés – un pourcentage plus élevé que la moyenne des autres pays participant à cette Enquête - conviennent que les personnes d’origines culturelles et religieuses différentes devraient avoir les mêmes droits et les mêmes opportunités et que la diversité est importante pour la prospérité de la société. 

Il convient également de préciser qu’une minorité importante - 40% - considère cette diversité comme une menace potentielle pour la société - il s’agit d’une expérience encore nouvelle dans ce pays et nous ne nous y sommes pas encore totalement habitués. Cependant, 90% ou plus accepteraient une personne d’origine culturelle différente comme collègue de travail, à l’école, comme voisin ou comme membre de leur propre famille.

Finalement, une statistique intéressante ressort dans ce cadre. A la question « Si vous pouviez commencer une nouvelle vie, dans quel pays du monde la commenceriez-vous ? », près de la moitié des autres pays européens et des pays du sud et de l’est de la Méditerranée ont répondu « leur propre pays », ce qui, je crois, correspond à ce que l’on attend. Mais dans le cas de l’Irlande, seulement 18% des sondés ont répondu l’Irlande comme premier pays de choix. 

Il y a là un point intéressant, je pense, qui est que la tradition de l’émigration comme option par défaut, qui nous accompagne depuis des siècles, est toujours une partie profondément ancrée dans notre culture.

Merci beaucoup !